Réapprendre à Éduquer, à Partager et à Vivre dans un Monde de l’Instantanéité

L’éducation, la parentalité, le lien social… Tout semble se déliter à mesure que nous avançons dans cette ère du tout, tout de suite. Les parents ont abandonné leurs enfants, souvent sans s’en rendre compte. Personne n’éduque plus pour le bien commun, pour le vivre ensemble. On a confondu inclusion et laxisme, jusqu’à ne plus savoir poser de cadre. Pendant ce temps, les réseaux sociaux ont donné le pouvoir à la superficialité et à la bêtise, laissant la réflexion et la nuance sur le bord de la route.

Je suis sur plusieurs groupes de parents en ligne. J’aime observer différents milieux, comprendre ce qui se joue ailleurs que dans ma propre réalité. Et ce que j’y lis est flippant. Des dizaines de messages de parents en détresse face à leurs enfants de 2, 3, 6 ou 8 ans. Comment peut-on se faire malmener par un enfant de 2 ans ? La réponse est pourtant évidente : ce n’est pas l’enfant le problème, il n’est que le miroir des parents. L’éducation commence par soi, par la manière dont on se reconstruit et dont on prend du recul sur ses propres blessures avant de transmettre.

Mais ce recul, beaucoup ne l’ont pas. Après avoir abandonné leur rôle éducatif, certains parents en viennent à idéaliser leur enfant comme s’il était la 8ᵉ merveille du monde. Ils refusent tout cadre, puis exigent des enseignants qu’ils réparent le travail qu’eux-mêmes n’ont pas fait.

L’an dernier, j’ai quitté un groupe de parents d’élèves sur WhatsApp. Une véritable dynamique de haine était en train de se créer contre une institutrice. Je ne voulais pas cautionner cette spirale toxique. J’ai expliqué à l’admin du groupe que laisser se déverser autant de colère et de frustration, c’était donner un terreau fertile à des comportements violents, à des agressions envers les enseignants, comme on en voit trop souvent. J’ai aussi ajouté que si les parents veulent se mêler du travail des enseignants (qui ont un BAC +5 et font leur métier par vocation), alors il faudrait aussi accepter que les enseignants puissent intervenir sur l’éducation donnée à la maison. Sinon, c’est trop facile.

Le lendemain, cette admin est revenue vers moi avec une charte de bonne conduite qu’elle a imposée dans le groupe. Ce genre de réaction me rassure. Il y a encore des personnes capables de prendre du recul, de poser des limites et d’instaurer de la bienveillance. Mais elles sont de plus en plus rares…

Une Société qui se Coupe du Partage et de la Nuance

Ce qui me frappe encore plus, c’est que ce phénomène dépasse largement le cadre de l’éducation. On ne partage plus rien. Ni entre amis, ni en famille, ni dans la société. On vit par procuration, à travers des écrans, dans une illusion de connexion qui ne fait que nous éloigner les uns des autres.

La polarisation ambiante renforce cette fracture. Tout est binaire, tout est clash. Soit tu es avec moi, soit tu es contre moi. Il n’y a plus de place pour le débat, la nuance ou la réflexion commune. On ne cherche plus à comprendre, on cherche juste à avoir raison et à écraser l’autre.

Ce qui en découle, c’est une déconnexion de l’humain. On ne prend plus le temps d’écouter, de soutenir, de s’entraider. Même dans les groupes censés apporter du soutien, les parents en difficulté se font souvent couper en deux, jugés plutôt qu’aidés. La culture de l’instantanéité commence déjà chez les parents, bien avant de toucher les enfants.

Mais il y a un espoir. De plus en plus de personnes ouvrent les yeux, et l’on voit émerger de magnifiques initiatives. Des cercles de discussion bienveillants, des mouvements pour ralentir, retrouver l’essence du lien humain. Il y a un besoin urgent de réinstaurer la demi-mesure, de sortir de cette logique extrême où tout est soit permis, soit interdit, soit parfait, soit à jeter.

Comment Retrouver l’Équilibre ?

Il ne s’agit pas de revenir à un modèle rigide et autoritaire, mais de réapprendre à poser des bases solides :

  • Soutenir les parents sans les juger, en les aidant à prendre du recul sur leur propre histoire.
  • Encadrer l’usage des écrans et des réseaux, qui déforment la perception du monde et poussent à l’instantanéité.
  • Redonner leur juste place aux enseignants, en reconnaissant leur rôle sans les accabler de missions qui ne leur incombent pas.
  • Revaloriser le temps long, la patience, la construction progressive de l’éducation et du lien social.
  • Remettre la nuance au centre des discussions, éviter les étiquettes et accepter que tout ne soit pas figé.

La clé, c’est le rééquilibrage. Redonner du temps aux choses, réapprendre à échanger avec profondeur, recréer du lien hors des écrans. Parce que si on continue sur cette voie, on finira par être une société d’individus isolés, connectés en surface mais profondément déconnectés à l’intérieur.

Il est temps d’inverser la tendance. D’éduquer avec du sens, de partager avec sincérité, et de vivre vraiment.

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